Yennayer : du rapport à la terre au référent identitaire
Nnayer ou Yennayer ou Nouvel An amazigh ou encore, comme on l’appelle en Kabylie, « Tawwurt n useggas », qui coïncide avec l’arrivée de l’hiver et le début de la saison agricole (Said Bouterfa, 1996 : 58), est l’une des plus anciennes manifestations culturelles qui subsiste encore de nos jours en Algérie et dans l’espace nord-africain. Il est l’une des célébrations les plus populaires des habitants d’origine de Tamazgha, de l’oasis de Siwa au sud du grand Sahara jusqu’aux îles Canaries, qui ont en commun tout un patrimoine culturel.
Yennayer a une portée identitaire et historique commune pour toutes ces populations qui le célèbrent annuellement chaque 12 janvier. Selon Jean Servier, dans son article Les rites de labours en Algérie (1951 : 180), le jour de yennayer représente le dernier jour des labours-semailles pour tous les paysans.
Il existe des différences dans les pratiques de célébration mais qui renvoient dans leur majorité aux origines et sources de l’année agricole amazighe. Un consensus culturel rassemble les populations qui le célèbrent, qu’elles soient arabophones ou amazighophones, et qui fait de cette manifestation un lien social rassemblant les populations nord-africaines. Ce lien convie les populations à un point de rencontre et de solidarité autour de leur culture, malgré la diversité des pratiques, cela par « la répétition et la continuité des règles qui le confortent [yennayer, ndlr] dans la consécration de la permanence de l’événement social ou mythologique qu’il a engendré » (Toualbi Noureddine, 1988 : 34).
Ainsi, il y a lieu de s’interroger, à ce niveau, comment yennayer porte-t-il une dimension identitaire et historique ? Pourquoi ses manifestations, ses rites et ses croyances légendaires existent-ils encore dans l’imaginaire populaire, et qui se reflètent dans les pratiques et traditions cérémonielles dans toutes les régions du territoire algérien ? Pourquoi ces coutumes et rites résistent-ils toujours malgré les changements et les transformations culturels ?
Le patrimoine culturel de yennayer ne se réduit pas à une célébration ou à une fête, mais il est porteur de nombreux symboles et significations culturels complexes entre le cérémonial et le rituel, ou le légendaire, l’historique et la croyance. Tout comme l’homme a ses rites et ses pratiques à l’occasion de yennayer, la femme joue un grand rôle dans la préservation des coutumes et des traditions de yennayer et dans leur transmission aux générations à travers les récits des contes et des légendes et son implication dans les différents préparatifs.
Yennayer représente un patrimoine immatériel qui consolide l’unité culturelle, d’autant qu’il est officialisé fête nationale. Il est partie intégrante, indivisible de l’identité algérienne.
Ceci-dit, du fait de son importance en tant que symbole et référent identitaires, yennayer nous invite à lui consacrer une journée d’étude afin de contribuer à identifier les
ambiguïtés et débattre des différents aspects qui lui sont rattachés.